Les statistiques diffusées par le cabinet d’études « La longue vue » sont édifiantes : près de 14 % des pharmaciens de plus de 62 ans sont installés dans un désert médical. De quoi craindre pour la cession de leur officine et la continuité des soins dans ces territoires fragiles.
Alors que l’accès aux soins recule dans de nombreuses régions, les projections sur les années à venir sont inquiétantes, révèle une étude du cabinet La longue vue sur la démographie officinale. En effet, sur les 3 438 titulaires âgés aujourd’hui de plus de 62 ans, 476 exercent au sein de l’une des 12 125 communes situées dans un désert médical. « Sans successeurs pour ces pharmaciens, ces territoires deviennent des zones de risque officinal élevé », analyse La longue vue.
Le cabinet d’études, qui scrute les évolutions sur l’ensemble de la France, commune par commune, identifie dans une carte très précise, les zones les plus à risque, notamment les régions du centre de l’Hexagone.
Autre lecture de cette carte, les régions Hauts-de-France, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Île-de-France sont celles où se concentre cette classe d’âge de pharmaciens. « C’est le résultat des politiques d’installations dérogatoires des années quatre-vingt », analyse Marine Lombard, directrice générale de La longue vue.
Ces effets posent différentes problématiques. Dans ces territoires fragilisés en offre de santé, les officines seront peu attrayantes pour des jeunes diplômés dont on sait désormais qu’ils sont plus attirés par l’exercice groupé au sein de pharmacies enregistrant par conséquent un chiffre d’affaires supérieur à la moyenne. Ce déséquilibre entre ces départs à la retraite et l’arrivée insuffisante de nouveaux professionnels pour assurer la relève aura indéniablement des effets collatéraux sur le maillage officinal et, de manière plus large, sur l’accès aux soins des populations concernées.
Le décret sur les territoires fragiles permettra-t-il d’endiguer ces dérives et de consolider le maillage officinal ? Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) en doute. « Ce ne sont pas les 20 000 euros d’aide aux officines identifiées en territoire fragile qui changeront la situation. Ces pharmaciens vont trembler pour leur relève. » Le syndicat, qui a déposé un recours auprès du Conseil d’État, a – entre autres - dénoncé l’âge limite fixé à 65 ans pour prétendre à cette aide. Il estime discriminant d’exclure des titulaires encore en exercice qui, de surcroît, devront rester en activité parce qu’ils ne parviennent pas à céder leur fonds. Pierre-Olivier Variot cite les statistiques 2023 de l’Ordre* : 6,2 % des inscrits en section A, soit 1 532 titulaires, sont aujourd’hui âgés de 66 ans et plus. C’est 0,5 % de plus qu’un an auparavant.
*Démographie des pharmaciens. Panorama 2023
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