QUALITÉ et quantité. « Loin d’être antinomiques, ces deux notions apparaissent parfaitement complémentaires dans le domaine de la substitution », selon Philippe Besset, vice-président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). Une complémentarité qui se révèle toutefois souvent difficile à percevoir pour des officinaux ayant tendance à considérer que la rémunération sur objectif de santé publique est plutôt synonyme de complexité pour les génériques.
Et pour cause ! « La ROSP liée à la substitution générique est calculée à la fois sur le volume des boîtes de génériques dispensées par la pharmacie et sur la performance du pharmacien que traduit le taux de substitution », précise Philippe Besset. Une double condition que les officinaux ont du mal à comprendre, et parfois même les incite à considérer « cette prime générique » comme un « quasi fait du prince ». Jean-Patrice Folco, installé en Isère, s’étonne ainsi que l’assurance-maladie lui ait reconnu un taux de substitution de 72,72 % qui, selon ses propres statistiques, s’élèverait en fait à 77,7 % et « dépasserait les 80 % pour les 29 molécules servant de base au calcul de sa prime générique, établie sur six mois et payée en juin ».
Sur le papier, la méthode paraît pourtant simple. « Il suffit de dispenser des volumes importants et d’avoir un taux de substitution élevé. » Mais, dans la réalité, les faits semblent un peu plus complexes. En effet, selon l’avenant à la convention de mars 2012, le taux de substitution à atteindre n’est pas unique. « Cette année encore, les accords signés avec l’assurance-maladie prévoient un taux de substitution spécifique pour trente molécules et un taux de substitution pour le reste du répertoire », explique Gilles Bonnefond, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). Soit trente et un taux au total, dont l’un concerne quelque 240 molécules.
Un avenant que « seuls l’Union nationale des pharmacies de France (UNPF) et l’USPO avaient d’ailleurs accepté de signer », rappelle au passage Gilles Bonnefond, avant que Philippe Besset ne relativise en précisant à son tour que « la FSPF souhaitait d’abord conclure l’avenant sur les honoraires, conformément au calendrier initial ». Les deux syndicalistes s’accordent néanmoins à reconnaître l’utilité de cette prime, qui « a permis au réseau d’engranger 80 millions d’euros en 2012 et vraisemblablement 15 millions de plus en 2013 ». Soit, au total, 155 millions, au lieu des 140 millions qui auraient dû être perçus sur une année pleine.
Beaucoup de déçus.
D’où le mécontentement d’un certain nombre de pharmaciens qui, à l’instar de cet officinal de Thiviers (Dordogne), ont « du mal à comprendre que leurs efforts ne soient pas mieux récompensés ». Car nombre d’officinaux, comme ce pharmacien de Digoin (Saône-et-Loire), se sont retrouvés avec des primes qu’ils jugent trop peu élevées et, pour un certain nombre, en dessous de la prime moyenne dont le montant, pour 2012, s’établit à quelque 3 307 euros selon l’assurance-maladie et les syndicats représentatifs.
Une prime moyenne qui, bien évidemment, masque des disparités régionales, voire départementales. « À l’instar de la Vendée, où le montant moyen atteint 5 400 euros, les départements bretons et des pays de la Loire font ainsi figure de bons élèves. » À l’inverse, avec 1 700 euros en moyenne, « les primes versées à Paris sont nettement moins élevées et aussi peu importantes que celles versées en Corse ou en Haute-Garonne », selon Gilles Bonnefond.
Mais il convient là aussi de distinguer selon les officines et, le plus souvent, en fonction de la taille de celles-ci, puisque « le montant de la prime dépend à la fois des économies réelles réalisées par l’assurance-maladie et correspond à un pourcentage calculé ligne à ligne », précise le président de l’USPO. Une pharmacie qui vendrait 90 boîtes d’oméprazole et dix boîtes de Mopral, par exemple, aurait un taux de substitution de 90 % sur cette molécule. Et ce taux lui permettrait de prétendre au paiement d’une prime dont le montant serait calculé sur les volumes dispensés au cours de l’année. À l’inverse, une autre pharmacie qui, sur 1 500 boîtes de ce même inhibiteur de la pompe à protons (IPP), dispenserait 1 000 boîtes du générique et 500 boîtes du princeps, atteindrait donc un taux de substitution de 66,6 % et « ne pourrait donc prétendre à la moindre prime ; quand bien même le nombre de boîtes dispensées serait supérieur à celui de sa consœur », explique Philippe Besset.
La raison ? « Elle n’aurait pas atteint son objectif sur molécule, puisque son taux de substitution serait inférieur au taux moyen national fixé pour la dite molécule. » En revanche, si cette pharmacie avait atteint le même taux de substitution que sa consœur sur cette molécule, sa prime aurait été nettement supérieure, puisque les volumes concernés auraient été beaucoup plus importants. En clair, deux officines qui arriveraient au même taux de substitution globale pourraient donc percevoir des primes très différentes, en raison d’un volume différent d’unités vendues.
Jusqu’à 10 000 euros.
Alors qu’ils revendiquent un taux de substitution à peu près équivalent, sur les six mois de l’année 2012, Jocelyne Wittevrongel a ainsi perçu une prime d’environ 3 000 euros dans son officine de Saint-Gaultier (Indre), tandis que Philippe Besset recevait 5 000 euros pour la substitution réalisée dans sa pharmacie de Saint Limoux (Aude). Une différence que les deux syndicalistes considèrent comme logique puisque « la prime dépend non seulement de la quantité de génériques dispensés et de leur nombre par rapport au princeps, mais aussi de la taille de l’officine ». Ainsi, plus le chiffre d’affaires de la pharmacie est important, plus la prime liée à la substitution générique devrait l’être.
Conséquence : les pharmaciens les moins performants n’auront perçu que quelques centaines d’euros, alors que « les meilleurs substituteurs auront reçu quelque 10 000 euros ». Mais ces différences devraient s’atténuer en 2013. « Lorsque la prime sera calculée sur une année pleine, le montant maximum ne devrait pas excéder les 14 000 euros », précise encore Philippe Besset, avant d’ajouter : « seuls ceux qui partiront de très loin doubleront leur prime ».
Le vice-président de la FSPF escompte ainsi atteindre les 7 500 € soit une progression de 50 % ; pendant que Jocelyne Wittevrongel espère passer de 3 000 € à 5 000 €. Quant à Gilles Bonnefond qui, sans révéler le montant de sa prime, précise qu’elle se situe dans la moyenne départementale, soit quelque 3 800 euros pour la Drôme, il espère bien, cette année encore, que son département sera 10 % au-dessus de la moyenne nationale.
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