Chef de rayon, logisticiens, acheteurs… La pharmacie voit émerger de nouveaux métiers, souvent inspirés du monde de la GMS. L’arrivée de ces salariés dans les équipes officinales depuis la fin de la pandémie n’est pas un hasard. Elle correspond à l’apparition de l’inflation qui a largement contribué, avec la pénurie de personnels, à gonfler la masse salariale. De même que l'augmentation de 3 % du point officinal intervenue au 1er juillet, qui répond certes aux problématiques de pouvoir d'achat des salariés, mais inquiète aussi quelques titulaires confrontés à des difficultés économiques.
Comment, dans ce cas, maintenir l’activité de l’officine tout en continuant à rémunérer correctement pharmaciens et préparateurs ? Certaines instances de la profession se sont penchées sur cette difficile équation et ont tenté de la résoudre par une nouvelle stratégie. Il suffirait, suggèrent-elles, d’affecter à des fonctions non pharmaceutiques – notamment celles du back-office - du personnel pouvant remplir ces postes à des coûts moindres. Dégagés de ces tâches, pharmaciens et préparateurs pourraient alors se consacrer entièrement au comptoir et aux nouvelles missions dans l’espace de confidentialité. Autre argument, cette projection est en totale adéquation avec les avancées récentes qu’a connu le métier de préparateurs. Ceux-ci n’ont-ils pas obtenu récemment l’autorisation de vacciner (1) ? Ne vont-ils pas se voir attribuer prochainement le statut de professionnel de santé et être enregistré au RPPS ? Le DEUST (2) consacre par ailleurs l’universitarisation de la profession. Et prédit de profonds bouleversements de la grille salariale sur fond de réforme de l’évolution de carrière des préparateurs, des préparateurs/techniciens et des pharmaciens adjoints.
Sur-mesure
Des évolutions sont en marche et rien ne pourra désormais les arrêter. Certains groupements avaient anticipé ce mouvement. En fin d’année dernière, Pharmabest a lancé des cursus diplômants de conseiller/chef de rayon en parapharmacie ou de responsable du back-office, deux bachelors (3) intégrant les spécificités de l’officine. La première promotion de ces jeunes étudiants recrutés à BAC+2 recevra bientôt son diplôme et, preuve du succès de cette formation, 90 % ont choisi de poursuivre en master Management et stratégie d'entreprise (spécialisation RH, droit social & management et spécialisation stratégie d'entreprise). « Nous devrions par ailleurs accueillir une trentaine de jeunes à la rentrée pour la deuxième promotion », se félicite Alain Styl, directeur général de Pharmabest, ajoutant que ces formations sont également ouvertes aux salariés de l'officine dans le cadre du dispositif de la validation des acquis de l'expérience (VAE).
Ce partenariat entre le groupement et l’école de commerce marseillaise, ESTC, répond à un objectif : fournir aux pharmacies, notamment aux plus grandes d'entre elles, des salariés spécialisés dans les fonctions support, ces métiers non pharmaceutiques qui composent jusqu'à 50 % des effectifs des grandes officines. Car pour David Abenhaim, président de Pharmabest, lui-même titulaire, il s’agit avant tout d’entériner une situation, d’acter la formation des équipes en place et de pallier le manque de personnels : « Pour faire fonctionner nos grandes pharmacies, au-delà des pharmaciens et préparateurs qui traitent les ordonnances, nous employons une part importante de spécialistes du retail, de la logistique, des ressources humaines… Or aucune formation spécifique n’existe pour préparer ces futurs professionnels à l’exercice de leur métier en pharmacie. C’est pourquoi nous lançons ce programme innovant qui doit permettre de recruter définitivement à la fin de leur parcours de jeunes professionnels. »
Taille critique
Cette spécialisation des métiers supports à destination de l’officine a également été voulue par cinq groupements réunis sous la bannière d’Agir Pharma. Cette association vient de fonder un partenariat avec l’École supérieure de commerce et de gestion d’Antibes (GPEI), un BTS MCO (Management commercial opérationnel). « Il suffira d'une douzaine d’étudiants intéressés par l’option officine pour que nous ouvrions à la rentrée une division spécifique avec des cours dispensés par des pharmaciens, des préparateurs et des partenaires du hors monopole, comme l’orthopédie », promet Didier Le Bail. S’il ne peut encore présager du succès de cette filière auprès des tout récents bacheliers, le président d’Agir Pharma connaît l’intérêt des titulaires pour ces futurs salariés. « Les pharmaciens ne trouvent plus personne pour le back-office et c’est un leurre de croire qu’un robot peut à la fois faire le merch, les prix, les relances, les avoirs et la facturation, ou encore l’animation commerciale », s’amuse-t-il.
Autre argument en faveur de ces jeunes diplômés, leur niveau de rémunération qui sera limité à celui d'un BAC +2. Ces nouveaux métiers s’adressent-ils pour autant à toute typologie d’officine ? Il existe en effet, selon Didier Le Bail, une taille critique pour recruter l’un de ces nouveaux diplômes et qu’il fixe à trois personnes, titulaire compris. Sans compter qu’une autre contrainte pèse également sur les ressources humaines de l’officine : au-delà d’un seuil de 1,3 million d’euros hors taxe de chiffre d'affaires, tout titulaire a l'obligation de se faire assister d'un adjoint. Un adjoint supplémentaire doit être embauché à chaque fois qu'une tranche de 1,3 million d'euros est révolue.
(1) Les textes d'application sont toujours en attente.
(2) Diplôme d'études universitaires scientifiques et techniques (DEUST).
(3) Niveau BAC+3.
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