- Mon père ne m’a rien dit. Il veut me préserver, et il veut la préserver aussi. Et moi je n’ai rien vu, rien.
Adossé au mur, J-C raconte à son associée Karine l’après-midi qu’il vient de passer avec ses parents et un vieil ami de la famille. Karine l’écoute d’une oreille ; sa pensée est absorbée par le PLFSS 2025. Élue députée en juin, c’est la première fois qu’elle doit se plonger de façon aussi approfondie dans ce texte de loi. Elle bute sur un article en particulier.
- Il faut être juriste pour le comprendre, s’exclame-t-elle soudain.
J-C poursuit, sans se soucier de la réaction de sa consœur et amie :
- Je me dis que tout n’est pas perdu. Quand je l’ai reprise après ses propos décalés sur la marge dégressive lissée, lui disant que ça datait des années 90, elle m’a regardé fixement. Tu sais, comme elle sait faire pour impressionner les gens. Et elle m’a répondu : « mais je le sais ça. Je dis juste que c’était une belle bêtise. Idem pour le tiers payant. Nous sommes devenus les pions de l’assurance-maladie ».
- Oh, encore lui, dit Karine en lisant un SMS sur son téléphone. Il ne me lâche plus.
- Je vois bien que le compte à rebours est lancé. Ses capacités cognitives se dégradent et ça va aller en empirant. Elle qui savait tant de choses sur la pharmacie et les médicaments. Un puits de science.
- Et si vous veniez dîner avec Delphine samedi soir. On pourra en parler plus librement qu’ici. Oh, encore un SMS.
- Pour toi aussi le compte à rebours est lancé on dirait.
- Ce PLFSS est d’un compliqué. Heureusement que j’ai des assistants parlementaires pour m’aider. Je découvre la complexité de la politique et des politiciens.
Dans la pharmacie, l’activité est intense. Alors qu’elle termine la dispensation d’une ordonnance de tramadol LP, Marion s’adresse à sa patiente :
- Votre ordonnance est encore valable un mois, mais à partir du 1er décembre, la réglementation pour ce type de médicament change. Il faudra revoir votre médecin plus tôt que prévu sinon…
- Sinon, pas de tramadol c’est ça ? Je prends ça pour le plaisir peut-être ?
- Non, personne ne dit cela. Mais ce médicament fait l’objet d’un trafic, d’où les nouvelles mesures.
- Vous savez combien de temps il me faut pour avoir un rendez-vous chez mon médecin.
La pharmacienne sent la question piège et préfère garder le silence.
- Au moins deux semaines. Sauf que dans deux semaines, je pars quelques jours pour un séminaire professionnel. Je fais comment ? Hein ?
Marion reste calme.
- Je sais que cela est contraignant, mais il reste encore un mois. Si vous prenez un rendez-vous maintenant, ça ira ?
- Excusez-moi, ce n’est pas contre vous mais cette douleur, tout le temps, ça m’épuise…
- Le tramadol ne vous soulage pas ?
La patiente hausse les épaules.
- Ce n’est pas formidable.
- Si ce médicament n’apporte que peu de bénéfice, il faut peut-être passer à autre chose…
- J’ai tout essayé.
- Tout ?
- Oui, enfin je crois.
- Aujourd’hui, c’est compliqué, dit Marion en montrant les nombreux patients dans l’officine. Mais revenez demain et nous irons en discuter dans une pièce à l’écart. Il reste certainement des pistes pour vous soulager…
(à suivre…)
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