« Qui a entendu parler de la certification périodique des professionnels de santé " à Ordre " ? » Lorsque le Pr Antoine Dupuis pose la question, rares sont les mains à se lever dans l'assistance. Et pour cause, encore bien peu de pharmaciens ont connaissance de cette nouvelle exigence qui devrait pourtant s'imposer à eux dans moins de 3 mois. Comme le rappelle le président du Conseil national professionnel des pharmaciens (CPOPH) devant les participants du VIe colloque de l'AP2DG*, c'est l'ordonnance du 21 juillet 2021, prévue par la loi santé du 24 juillet 2019, qui a consacré cette prochaine obligation. À partir de 2023, l'ensemble des médecins, pharmaciens, infirmiers, chirurgiens-dentistes, sages-femmes, masseurs-kinésithérapeutes et pédicures-podologues devront y souscrire. Cette nouvelle obligation touchera non seulement les nouveaux diplômés (tous les 6 ans) mais aussi les professionnels en exercice, ce qui n’était pas initialement prévu dans la loi de 2019. Pour ces derniers, la certification devra être validée tous les 9 ans, soit une première certification à prévoir au 1er janvier 2032.
Un « super DPC »
Garantir le maintien des compétences, la qualité des pratiques professionnelles, ainsi que l'actualisation et la mise à niveau des connaissances, tels sont ainsi définis, dans l'ordonnance de 2021, les objectifs de la certification périodique des professionnels (CPP). La CPP serait-elle donc un super DPC ? « Dans les objectifs, cela fait vraiment beaucoup penser à la formation continue… Un DPC, avec des plus », estime Antoine Dupuis. De fait, si parmi les 4 blocs de la future CPP, l'actualisation des connaissances et la qualité des pratiques professionnelles entrent déjà dans le champ d'application du DPC, l'amélioration de la relation avec les patients et surtout la prise en compte de la santé personnelle du professionnel viennent clairement s'ajouter au dispositif.
« Mais attention, prévient le président du CPOPH, c'est la certification qui va permettre de valider le DPC, et non l'inverse. » Autrement dit, le DPC est comme un sous-ensemble de la CPP. Et c'est à ce niveau - celui de la validation du DPC -, que la profession prend un peu la main dans le chantier de la certification, explique en substance Antoine Dupuis. Conformément au second alinéa de l'article R.4021-4 du CSP, pour satisfaire à leur obligation de DPC, les pharmaciens s'attachaient jusque-là essentiellement à s'engager dans des actions de formation et d'accréditation. « Mais il faut aussi lire le premier alinéa de ce même article, souligne Antoine Dupuis. Celui-ci stipule que " pour chaque profession ou spécialité, un parcours de développement professionnel continu est défini, en application de l'article L. 4021-3, par le conseil national professionnel compétent ". »
Les pharmaciens reprennent la main sur leur DPC
Les pharmaciens disposant d'un conseil national professionnel depuis 2014 - le CPOPH -, ils sont donc en mesure de dessiner eux-mêmes le parcours de DPC qui leur est dédié. Or c'est bien celui-ci qui entre pour bonne part dans la réalisation de la CPP. « Les pharmaciens ont donc, pour ainsi dire, la main sur la définition des formations et actions à mener pour satisfaire à leur prochaine certification », résume-t-il.
En pratique, le CPOPH est déjà à l'œuvre depuis plusieurs mois pour l'élaboration du référentiel de certification ; l'ordonnance de juillet 2021 précisant que, « après avis du conseil national professionnel compétent (ici, le CPOPH), le ministre chargé de la santé arrête le référentiel de certification périodique de chaque profession (...) ». Avec cet objectif, le CPOPH a proposé un parcours DPC qui peut notamment comprendre plusieurs actions présentielles de formation (participation à des congrès ou à des journées de formation universitaires ou associatives, pourvu qu'elles soient listées par le CPOPH ou par un autre CNP). Mais aussi des actions de formation en e-learning.
N'oubliez pas de déposer vos attestations de DPC
Mais en cette fin d'année 2022, c'est l'achèvement du DPC triennal qui est d'actualité. « N'oubliez pas de déposer vos attestations sur le site DPC pour valider vos trois actions. C'est encore la liste disponible sur le menu déroulant de l'onglet "Mon-DPC" qui fait foi, mais celui-ci peut aussi être enrichi par les pharmaciens eux-mêmes », suggère Antoine Dupuis. « N'hésitez pas à déclarer votre participation à des initiatives de formation ou des actions qui ne sont pas encore listées. Le CPOPH les examinera et, s'il les juge pertinentes, les ajoutera au menu déroulant. »
Pour l'heure, les modalités pratiques de la certification périodique doivent encore être définies par décret en Conseil d'État. Et nul doute que sa mise en œuvre sera progressive. Quant à son contrôle, il sera dévolu aux Ordres professionnels qui pourront appliquer les sanctions disciplinaires suivantes : avertissement, blâme, interdiction temporaire ou définitive d'exercer la profession. Avec l'arrivée de la certification, l'obligation de DPC, jusque-là plutôt incitative, deviendrait donc progressivement un peu plus coercitive. Mais nous n'en sommes pas là…
D'après une intervention du Pr Antoine Dupuis lors du VIe Colloque de l'AP2DG.
* Association des pharmaciens distributeurs et dispensateurs de gaz médicaux.
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