Véritablement lancées début janvier, les négociations conventionnelles piétinent depuis plusieurs semaines. Au grand dam des syndicats de la profession, soucieux d’obtenir rapidement des avancées, notamment sur le volet économique. Car la situation financière de l’officine ne peut souffrir davantage l’attentisme qui caractérise la position des pouvoirs publics depuis la fin de la crise sanitaire. L’érosion de la marge face à l’inflation et à la hausse générale des coûts, y compris salariaux, met désormais en péril nombre d’officines et à terme, la densité du maillage officinal. Pour la première fois en 2023, le réseau a enregistré une fermeture tous les jours ouvrés de l’année (276 au total).
Des négos à un milliard d’euros
L’idée prédomine au sein de la profession que ces négociations ne devront pas déboucher sur la création de nouvelles missions ou services. Les titulaires sont souvent déjà bien en peine de les mettre en œuvre, tant les difficultés à recruter entament les forces vives d’équipes officinales, occupées par ailleurs à pallier les conséquences des pénuries de médicaments.
Dans ce contexte, les syndicats représentatifs de la profession parviendront-ils à obtenir une revalorisation à hauteur d’un milliard d’euros nécessaire à la consolidation du réseau ? Ils se sont jusqu’à présent heurtés à une fin de non-recevoir de l’assurance-maladie, plus soucieuse de valider ses propres chiffrages, évidemment moins favorables aux officinaux. Un point d’achoppement crucial puisqu’il met au point mort les discussions. « Nous sommes toujours en décalage », constate amèrement Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). « L’assurance-maladie nous a une nouvelle fois expliqué ses chiffres et pourquoi ils étaient justifiés selon elle, précisait Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France, à l’issue de la réunion du 1er février dédiée au sujet. En rappelant notamment que la rémunération sur le périmètre du médicament était positive, ce qui est vrai. Le problème, c’est que cette rémunération est beaucoup plus positive selon les calculs de l’assurance-maladie que selon les nôtres. » Et pour cause. L’organisme payeur a beau jeu de pointer un chiffre d’affaires du réseau officinal de 44 milliards d’euros pour 2023, en hausse de 6 % entre 2022 et 2023, et même de 23 % depuis 2020 *. De fait, les ventes de médicaments remboursables connaissent une croissance similaire, mais celle-ci est portée pour un tiers par les médicaments onéreux (prix supérieur à 1930 euros)*, peu rémunérateurs en termes de marge.
En l’absence de bases communes, les syndicats déplorent une navigation à vue. D’autant qu’ils ne sont pas informés des actes que l’assurance-maladie souhaite revaloriser. Pourtant, cette progression de la rémunération est une condition sine qua non pour les représentants de la profession. Il est hors de question de travailler plus pour gagner moins, met en garde Pierre-Olivier Variot, fixant la ligne rouge de ces négociations. La profession semble aujourd’hui bien décidée à faire valoir la plus-value que le réseau officinal apporte à un système de santé exsangue. Et à démontrer le rôle qu’elle entend jouer dans une prise en charge des soins non programmés souvent indigente dans les territoires. Quitte, pour se faire entendre, à emprunter le chemin pris récemment par les agriculteurs afin d’obtenir gain de cause auprès de l’exécutif ! La première réunion plénière de ce début mars aura fait bouger les lignes. Mais sera-t-elle suffisante pour débloquer une situation ? Les syndicats devront désormais capitaliser sur le rôle qu’ils jouent désormais dans le système de santé. Et peser de toute la force du réseau officinal.
Sources GERS Data
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