L’adhésion des pharmaciens au déploiement du numérique en santé n’est pas une question de choix. Pour Philippe Besset, président de la Fédération de syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), c’est obligatoire. Pour Alain Grollaud, président de la chambre syndicale des groupements et enseignes de pharmacies, Federgy, « c’est très attendu, c’est nécessaire, c’est indispensable pour exercer le métier de pharmacien ». La raison ? Il est impossible de s’investir dans les nouvelles missions sans cela.
Alain Grollaud énumère les exemples. Il en va ainsi de la dispensation sous protocole. Cette mission, jusque-là réservée aux pharmaciens en centre de santé ou en maison de santé pluriprofessionnelle (MSP), a été étendue aux confrères intégrés à une communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) l’été dernier, dans le cadre du plan pour les urgences mis en place par le ministre de la Santé, François Braun. « Ne pouvoir faire cette dispensation que si vous appartenez à une CPTS, c’est totalement obsolète ! », s’insurge le président de Federgy. Au vu des CPTS existantes et de celles qui comptent un pharmacien, cette limitation réduisait la possibilité de réaliser un protocole de coopération à 30 % du territoire, soulignait dès le mois de juillet Pierre-Olivier Variot, président de l’USPO. Mais d’après Alain Grollaud, le résultat est bien plus décevant : seulement 25 pharmaciens en France ont réussi à réaliser des dispensations sous protocole ces derniers mois. Car, explique-t-il, il s’agit d’une délégation de tâche d’un médecin de la CPTS à un autre professionnel de santé. « Quand vous êtes subordonné au médecin qui ne veut pas donner délégation, vous êtes dans une impasse. »
Appel aux pouvoirs publics
Le même problème se pose pour la mission de pharmacien correspondant. Ce pharmacien désigné par son patient doit appartenir à la même structure d’exercice coordonné que le médecin traitant et ce dernier doit mentionner sur l’ordonnance s’il autorise le pharmacien correspondant à ajuster les posologies et/ou à renouveler un traitement chronique. De plus, cette mission est réservée aux pharmaciens exerçant dans les zones d’intervention prioritaire (ZIP) et les zones d’action complémentaires (ZAC). Selon les données de Federgy, seulement 14 % des pharmaciens déploient le dispositif.
Que ce soit pour la dispensation sous protocole ou pour le pharmacien correspondant, Alain Grollaud « en appelle aux pouvoirs publics » pour assouplir les conditions de réalisation, en permettant à des pharmaciens dans d’autres formes d’exercice coordonné d’y participer et en appuyant la coordination interprofessionnelle sur les outils numériques. « Toutes les professions libérales au travers de leurs syndicats revendiquent l’intégration des ESCAP (équipes de soins coordonnées autour du patient – NDLR) mais on peut aller plus loin en autorisant une forme d’exercice coordonné reposant sur la délégation du patient qui désigne lui-même son médecin, son infirmier, son pharmacien… Il y a des applications qui permettent déjà ce type d’organisation, on voit à quel point le numérique est un outil formidable pour mener les nouvelles missions. »
Sécurité et confiance
Autre mission, la contribution du pharmacien au développement du marché des biosimilaires. Pour ce faire, le droit de substitution biosimilaire est devenu réalité, mais limité à deux molécules pour lesquelles le taux de pénétration des biosimilaires est déjà élevé. En sus, en cas de substitution, le pharmacien est tenu d’informer le patient et le prescripteur, « ce que le numérique nous permet de faire instantanément et en toute sécurité ». C’est à la même obligation que le pharmacien devra répondre lorsqu’il deviendra prescripteur de vaccins en janvier prochain. « Le suivi de la vaccination entre dans le champ du suivi de la prévention qui va prendre de plus en plus de place à l’officine. Il est normal et nécessaire que l’information circule, que ce soit pour le patient ou ses professionnels de santé. Là encore, c’est par le numérique que la transmission se fera. »
Enfin, c’est encore sur le numérique qu’Alain Grollaud compte pour « relancer les entretiens pharmaceutiques » dans lesquels trop peu de confrères se sont investis, en facilitant le déroulé de l’entretien, la collecte des informations et le partage des informations avec les professionnels de santé du patient. Les outils numériques seront également le socle du développement du télésoin et d’une véritable relation entre la ville et l’hôpital au bénéfice du patient. « L’interprofessionnalité numérique est indispensable et doit s’articuler autour du patient ; à lui de décider de son équipe de soins, en toute sécurité pour ses données et en toute confiance avec les professionnels qu’il aura choisis. »
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